Magnétométrie en milieu bas bruit

Le LSBB offre l’opportunité d’étudier les phénomènes magnétiques corrélés à des évènements naturels modifiant l’environnement proche de la Terre (orages atmosphériques et magnétiques, éclipses, séismes…). Leur détection est possible grâce au système baptisé [SQUID]², combinaison indissociable et unique au monde d’une enceinte blindée souterraine et d’un magnétomètre ultrasensible à base d’interféromètres quantiques supraconducteurs fonctionnant à -270°C, communément appelés SQUIDs. Cet instrument enregistre en continu les variations du champ magnétique terrestre avec une sensibilité inégalée. L’analyse des données permet d’observer différents phénomènes naturels à l’échelle locale ou globale, à commencer par la variation circadienne du champ magnétique ; d’autres, résultant notamment de couplages avec l’ionosphère, ont été détectés et identifiés, certains pour la première fois par voie magnétique.

Une première approche consiste à comparer les mesures du système [SQUID]² aux données fournies par l’Observatoire magnétique national de Chambon-la-Forêt (CLF) .
Ces mesures sont issues de magnétomètres de type « SQUID » ayant une résolution de 0,1 nT qui donnent une mesure absolue des composantes du champ magnétique.
On observe notamment la période diurne durant laquelle la magnétosphère est comprimée par le vent solaire, ce qui diminue la valeur du champ à la surface de la Terre, en particulier sur la composante Est-Ouest (EW). Si l’intervalle de variation est atténué par rapport à CLF, les fluctuations présentent une meilleure dynamique liée à la sensibilité des SQUIDs . Il existe cependant des différences (en particulier sur la composante verticale Z) inhérentes à la situation géomagnétique des deux stations d’observations ; le champ magnétique local dépend en effet de la latitude et longitude ainsi que des variations locales du champ magnétique qui constituent justement un des thèmes d’étude au LSBB. 

Le système [SQUID]²

Le magnétomètre [SQUID]² est un moyen expérimental permanent du LSBB. Il est positionné dans l’ancien poste de tir (PCT n°1) dont l’objectif premier était de permettre aux officiers d’exécuter un ordre de tir en toutes circonstances. Ce poste a notamment été conçu pour résister aux effets consécutifs à l’explosion d’une bombe nucléaire. De ce fait, l’instrument bénéficie d’un environnement remarquable à plusieurs titres. Tout d’abord, il se trouve dans la zone la plus profonde du laboratoire,  c’est-à-dire à 1500 m de la plate-forme d’entrée et sous 518 m de roche karstifiée [Barbel - Perineau et al., 2012] ce qui assure sa protection sur le plan thermique et radiatif.

Ce système fonctionne en continu, avec une interruption d’une journée toutes les 3 semaines environ, réservée au remplissage du réservoir de 100 litres d’hélium liquide. Ce fluide est en effet nécessaire au maintien des températures cryogéniques assurant le fonctionnement supraconducteur des magnétomètres.La structure de l’enceinte blindée et sa localisation sous plus de 500 mètres de roche engendrent des conditions comparables à un filtre passe bas. Ainsi, le système [SQUID]² est à même de détecter, bien qu’atténuée, toute perturbation externe de fréquence inférieure à 40 Hz. Cette limitation permet d’accéder à la signature des évènements naturels sans être saturé par les perturbations de fréquences supérieures, imputables pour la plupart aux activités anthropiques. Du fait de l’écrantage du bruit extérieur, le niveau de bruit résiduel est estimé autour de 2 fT/√Hz, ce qui correspond à la limite intrinsèque de l’appareil utilisé lors de la qualification du site en 2001 (à titre d’exemple, cela représente 100 fois moins que l’activité magnétique cérébrale humaine en phase de sommeil). Ainsi, tout phénomène magnétique se produisant à l’intérieur de la capsule blindée peut ainsi être détecté si son intensité est supérieure à quelques femtoteslas .En fonctionnement normal, l’appareil capte les variations du champ magnétique avec une résolution de l’ordre de 10 pT (1 pT = 10-12 T) sur une plage de ± 166 nT. Il est possible, lors d’expériences ponctuelles, d’augmenter la sensibilité d’un facteur 10 ou 100 (ce qui diminue d’autant la plage de mesure). L’enregistrement des données se fait avec un système d’acquisition, synchronisé par GPS, identique à celui utilisé par les sismomètres du laboratoire ce qui facilite le cadre d’exploitation des données et leur comparaison dans une approche interdisciplinaire. Les données de [SQUID]² sont disponibles sur le serveur du LSBB (https://lsbb.cnrs.fr/) et ce, depuis 2006. Leur analyse permet d’étudier différents phénomènes naturels à commencer par la variation circadienne du champ magnétique terrestre ou l’influence des tempêtes solaires.